© Par François BLANCHET
Cette nouvelle édition digitale de Monnaie Magazine va, comme l’édition papier, vous parler de la numismatique, de la collection, de ses coutumes, de ses pratiques et de ses traditions… La culture numismatique est importante, elle va de pair avec la collection. Elle nous permet de pouvoir saisir toute la richesse et la profondeur de la numismatique. Ce mois-ci une question qui reste souvent posée pas nos lecteurs : pourquoi a-t-on frappé des pièces de monnaie à trou ?
Les collectionneurs et les numismates connaissent parfaitement les monnaies de type « Lindauer », qui sont présentes dans tous vos médailliers, comme témoins d’une période importante de notre histoire. Il s’agit de pièces avec un trou central, qui ont été frappées à partir de la Première Guerre Mondiale. Avec des valeurs faciales de 5, 10, 20 et 25 centimes, ces pièces à trou ont été produites de 1914 à 1946. Si beaucoup les collectionnent et les conservent précieusement, peu connaissent en revanche l’origine exacte de ce fameux trou central (ou décentré pour les plus chanceux), qui a pourtant fait la gloire de ces séries très prisées et très recherchées, en particulier en bon état de conservation.
Retour à l’histoire
Le 3 août 1914, le premier conflit mondial débute avec une violence sans limite. La France, certaine d’emporter la guerre en quelques semaines, déchante. Ses troupes s’enlisent, les morts se comptent par milliers. La réalité ne confirme pas les prévisions des chefs militaires et les espoirs de la population sont balayés.
Devant la menace allemande, l’Atelier Monétaire de Paris est délocalisé à Castelsarrasin (sud). La France qui voit les combats meurtriers s’installer sur son sol, a besoin d’argent et de métal pour continuer à se battre, et pour alimenter le front est de notre pays. C’est le fameux « effort de guerre » pour lequel les entreprises et les particuliers vont être sollicités et mis à contribution. De nombreuses solutions sont envisagées pour aider au combat, beaucoup d’idées sont étudiées, aucun secteur de l’économie n’est épargné, pas même les monnaies de circulation.
C’est pourquoi, après de nombreux conciliabules d’alcôves, le gouvernement français décide de réduire la quantité de métal utilisé pour fabriquer les pièces de monnaie. A cette époque, charnière de notre histoire collective, la France n’est pas le seul pays à mettre en place un tel procédé, et en 1914, la Belgique décide aussi de se lancer dans la production des pièces à trou.
Après le trou… le métal !
Partant du fait que le trou central de la pièce occupe environ un quart de l’espace rond de la monnaie, le Gouvernement estime qu’à la fabrication, il peut gagner une pièce quand il en fabrique quatre. L’opération est donc lancée en ce sens, et permet effectivement de récupérer du métal. Si l’Etat approuve le procédé, il utilise une communication différente pour justifier l’apparition de monnaies trouées. En effet, la communication officielle explique que c’est pour ne pas confondre ces monnaies avec celles frappées en argent, qu’un trou a été ajouté. Forcément, dans la population l’argument ne convainc pas. Et c’est bel et bien pour contribuer à l’effort de guerre que la fabrication de ces monnaies a été décidée.
Des économies furent également réalisées sur la qualité du métal utilisé à la frappe des monnaies. Ainsi, le nickel a été remplacé par le cupronickel (alliage de cuivre et de nickel) à partir de 1917, puis par le maillechort (alliage de cuivre, de nickel, et de zinc) à partir de 1938, et enfin par le zinc en 1941.
Gravés et imaginés par Emile Lindauer, ces « sous troués » comme on les a appelés, ont été frappés en grand nombre et ont inondé le marché français, pour perdurer jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Aujourd’hui, ces pièces qui ont été fabriquées de façon massive, restent courantes et se trouvent très facilement en Usure Normale et en Etat Courant. Vous pouvez donc les faire entrer dans vos collections sans difficulté majeure. En revanche, elles sont plus difficiles à trouver en état Superbe ou Neuf. Et là, les prix peuvent grimper ! D’autres variétés sont intéressantes avec des points avant et / ou après la date, des mots soulignés… On trouve aussi de nombreuses pièces fautées, ce qui renforce l’intérêt et la thématique des pièces à trou aux yeux des collectionneurs.