Lors d’un précédent salon numismatique annuel de Berlin, le World Money Fair, les représentants de la Monnaie Royale du Canada (RCM), établissement monétaire du pays, avaient annoncé la couleur devant les représentants des nombreuses autres Monnaies du monde : ils travaillaient à devenir le leader mondial en matière de frappes monétaires quelles qu’elles soient. C’est d’ailleurs ce que confirmait récemment Marc Brulé, son président intérimaire : « Nous sommes résolus à poursuivre la concrétisation de notre vision qui consiste à être la meilleure Monnaie du monde ». Et, pour ce faire, le maître mot de leur présentation est : innovation. Même son de cloche du côté de la Banque Nationale Canadienne et de sa production de billets. D’ailleurs, avant que le lauréat de la « pièce de l’année » ne soit révélé fin janvier dans ce même salon de Berlin, la RCM a déjà remporté le prix de la pièce « la plus inspirée », catégorie figurant dans cette série de prix annuels remis par la société américaine Krause Publication. Et c’est la pièce d’argent 2013 de 3 dollars sur « la pêche » qui a remporté ce prix.
10 ANS D’INNOVATION POUR LA MONNAIE ROYALE CANADIENNE
Pour la RCM, cette fin d’année 2014 marquait le dixième anniversaire du début d’un important processus d’innovation qui avait débuté le 21 octobre 2004 avec le lancement de la première pièce de circulation colorée au monde. En 2006, la RCM ouvre une nouvelle usine d’affinage d’argent qui va utiliser un processus innovant rendant cette activité plus rentable. En 2007, elle produit la plus grosse pièce d’or du monde : une « monnaie » d’une valeur faciale de 1 million de dollar en or pur, qui entre aussitôt au Guiness Book des records. En 2012, la RCM se fait à nouveau remarquer du monde numismatique avec la mise sur le marché d’une pièce photo-luminescente qui inaugure une série consacrée au dinosaures. Le jury de Krause Publications lui décernera le double prix de « Pièce de l’année » et « Pièce la plus innovante ». Ensuite, à l’occasion du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, elle émet une monnaie sertie d’un véritable diamant, non pas rapporté, mais fixé dans le cordon de la pièce au moment de la frappe.
Autre prouesse en 2013, la série de monnaies consacrées à Superman, se voit doter du premier hologramme achromatique, la RCM utilisant pour cela la technologie développée pour les passeports ou les documents à sécurité renforcée, donnant ainsi à une surface plane, l’apparence étonnante d’une gravure tridimensionnelle. En cette même année, elle inaugure ses nouvelles installations de placage et son nouveau centre de recherches en matière de technologies de monnayage.
Rappelons, au passage, la production des médailles Olympiques pour les athlètes des Jeux d’Hiver de 2010 à Vancouver qui inaugurent une nouvelles forme ondulée, fruit de recherches technologiques avancées.
Autre étape en matière d’innovation, les caractéristiques de sécurité, visibles ou invisibles, intégrées en 2012 dans les nouvelles monnaies de 1 $ et 2 $ qui en ont fait les pièces les plus sûres du monde. Monnaie Magazine a déjà eu l’occasion de vous les présenter en avant première. La combinaison de ces techniques de sécurité de pointe à valu à la RCM le prix inaugural « Meilleure innovation – nouvelles pièces » lors de l’Excellence Security Award organisé par l’International Association of Currency Affairs, un prix qui récompensait la percée la plus remarquable dans le domaine de la sécurité des pièces de monnaie en 2013.
Depuis, ces caractéristiques de sécurité ont été étendues aux pièces de placement Feuille d’Erable en or et en argent. Cette amélioration a porté sur une microgravure au laser, invisible à l’œil nu et permettant de confirmer l’origine et l’authenticité des pièces en or. Celles d’argent ont été rehaussées d’un nouveau fini composé de fines lignes radiales gravées à des intervalles de quelques microns qui créent un système original de diffraction de la lumière.
Et cet accent mis sur la technologie porte ses fruits car, dans un climat commercial général très difficile en 2014, la RCM arrive à faire progresser ses ventes de produits numismatiques de 16,5% par rapport à 2013, et ce sont celles qui étaient dotées d’un élément technologique de pointe qui ont remporté le plus de succès. C’est le cas, par exemple, de la pièce de 1 kg en or pur « Année du mouton », d’une série de trois pièces tirées de l’oeuvre d’Emily Carr ou de quatre pièces Superman qui se sont toutes vendues en moins de trois jours. Les deux pièces d’argent de 50 $ et 200 $ vendues à leur valeur nominale connaissent également en grand succès populaire. Mais elles sont réellement en argent fin…
Car le maître mot, qui rapproche l’action de la Monnaie Royale Canadienne et la Banque Nationale est leur assise populaire. Tant en matière de création qu’en matière de fabrication, ces deux institutions consacrent toute leur attention sur la satisfaction du public, canadien ou même étranger.
LA BANQUE DU CANADA CONSULTE SES USAGERS
Parmi ses différentes fonctions, la Banque du Canada a pour mandat d’émettre des billets de banque de qualité, à l’épreuve de la contrefaçon et aisément acceptés comme moyen de paiement. Cependant, pour « évoquer le Canada » dans une future série de billets de banque qui plaise au plus grand nombre, elle a décidé de consulter directement les Canadiens eux-mêmes. Une question que, avec l’Euro, nous, citoyens européens, nous ne nous posons plus !
La Banque du Canada a donc annoncé début octobre qu’elle invitait les Canadiens et les Canadiennes à s’exprimer sur les principes guidant la conception des billets de banque du pays. Cette consultation, se tenait jusqu’au 10 novembre et donnait la chance à la population de contribuer, pour la première fois, à l’élaboration des prochaines séries de billets par le biais d’un sondage sur internet. La Banque diffusera prochainement une synthèse des commentaires recueillis.
L’idée de tenir une telle consultation faisait suite à une étude menée par la Banque au sujet du processus de sélection, d’élaboration et de conception du contenu visuel de la série de billets en polymère. Il était ressorti de cet exercice que le public devrait être appelé à participer davantage au processus de conception des billets de la prochaine série. Elle entendait associer la population canadienne à toutes les étapes du processus, et en particulier à l’élaboration du contenu visuel (thèmes, sujets et illustrations).
UN LONG PROCESSUS PRÉALABLE
La Loi sur la Banque du Canada prévoit que la forme et la matière des billets doivent être, tout d’abord, approuvées par le Ministre des Finances. Aussi celui-ci est-il consulté aux différentes étapes du processus. Mais la Banque consulte également des spécialistes, des organisations et des ministères afin de s’assurer que les sujets choisis pour figurer sur les billets sont correctement représentés. Le nouvel élément est qu’intervient ensuite la consultation de la population canadienne. Cette consultation était organisée à une vaste échelle et en tenant compte, par exemple, de la représentativité démographique (échantillon représentatif de la population canadienne), en recourant à des méthodes tant qualitatives que quantitatives, et en mettant à profit les nouvelles technologies. La Banque souhaite aussi, par ce processus, essayer de déterminer l’intérêt pour des changements aux conventions établies en matière de graphisme des billets de banque (pour ce qui est de savoir, par exemple, si les billets devraient célébrer des réalisations individuelles particulières ou les réalisations collectives des Canadiens ou s’il convient de remplacer les personnalités dont le portrait orne les différentes coupures et, le cas échéant, selon quels critères). Dans un souci de transparence le résultat de ces consultations sera systématiquement publié.
6 PRINCIPES SIMPLES ET CLAIRS
La réalisation de ces nouveaux billets doit, néanmoins, respecter 6 principes clairs afin de ne pas partir dans tous les sens.
1 – La sécurité prime sur toute autre considération
La Banque doit fournir des billets de banque de qualité, aisément acceptés et à l’épreuve de la contrefaçon. La sécurité prime ainsi sur toute autre considération, et le contenu visuel des billets doit être compatible avec les éléments de sécurité retenus. C’est aussi une forte contrainte car la nécessité de doter les billets d’éléments de sécurité robustes limite, en pratique, le choix des éléments graphiques.
2 – Des billets fonctionnels et facilement reconnaissables
Les billets de banque doivent être fonctionnels et utilisables dans les guichets automatiques et autres appareils de traitement des billets. Ils doivent aussi être facilement reconnaissables en tant que tels et aisément acceptés comme moyen de paiement. Certains éléments visuels pourront être maintenus d’une série à l’autre dans la poursuite de ces objectifs.
3 – Des billets répondant aux besoins en matière d’identification des billets
Le graphisme des coupures doit offrir une gamme de caractéristiques destinées à en faciliter l’identification pour les personnes atteintes de cécité ou de déficience visuelle.
4 – Langues officielles
Ainsi que le prévoit la Loi sur la Banque du Canada, les billets de banque sont imprimés en anglais et en français.
5 – Des billets qui évoquent le pays
Une série de billets de banque est un moyen exceptionnel de représenter le Canada et mettre en valeur la diversité de la société, sa culture, son patrimoine naturel et ses réalisations. Ces billets doivent donc indiquer clairement qu’ils sont canadiens par des symboles, du texte ou des images, être riches de sens pour la population et le rester encore longtemps, traduire la fierté et la confiance à l’égard du Canada. Vaste programme !
6 – Des billets qui plaisent au plus grand nombre
Les billets de banque allient l’art et la technique. Le mariage du contenu visuel, des éléments de sécurité et des exigences fonctionnelles doit donner naissance à des billets attrayants sur le plan esthétique aux yeux du plus grand nombre de Canadiens.
Une expérience participative très originale que Monnaie Magazine vous fera régulièrement suivre.
Même si la Royal Canadian Mint n’a pas, à nouveau, remporté le prix de la « Pièce de l’année », on peut en tous cas admettre qu’elle a très largement atteint ses objectifs et peut être actuellement considérée comme « la meilleure Monnaie du monde ». Quant à la Banque du Canada, avec sa fabrication de billets polymères, elle fait également figure de leader mondial dans cette fabrication.