Le mécanisme des ventes aux enchères n’est pas récent puisque, durant l’Antiquité, nous avons des témoignages de tels procédés qui, au départ, portaient… sur les jeunes filles à marier. Puis ce mécanisme a servi, de manière générale, à commercialiser des ressources limitées ou même rares. Par extension, les objets dont il était difficile d’estimer les coûts ou dont la rareté était manifeste ont également fait l’objet de ces ventes. Ce fut plus particulièrement le cas des objets d’art. Et en la matière, l’hôtel Drouot à Paris, fut longtemps le leader incontesté de ce marché. Carrefour du marché de l’art, réservoir inépuisable de tableaux, de meubles et d’objets d’art, de toutes époques et de toutes valeurs, une salle des ventes est un musée magique et éphémère ouvert à tous. On peut simplement flâner devant les vitrines d’exposition, consulter les catalogues de ventes, mais aussi approcher les œuvres et les examiner, se renseigner sur leur estimation… et acquérir avec émotion l’objet de ses rêves.
DROUOT : UN PEU D’HISTOIRE
L’hôtel Drouot est la plus ancienne institution de ventes aux enchères au monde. Le bâtiment fut construit sur les terrains d’une ancienne propriété appartenant à Pinon de Quincy, « seigneur de la Grange Batellière ». Il est inauguré sous Napoléon III, le 1er juin 1852, et profondément transformé à la fin des années 1980. L’hôtel des ventes et la rue où il se trouve tiennent leur nom du Comte Antoine Drouot, général d’Empire. Auparavant, les ventes publiques se tenaient dans un bâtiment sis place de la Bourse. De 1976 à 1980, lors des travaux du nouvel Hôtel Drouot, les ventes eurent lieu dans l’ancienne gare d’Orsay, avant qu’elle ne soit transformée en musée. Il comporte actuellement 21 salles de vente aux enchères sur trois niveaux. Mais il en existe également trois autres situées à l’extérieur du bâtiment.
Ce lieu reçoit chaque jour 6000 visiteurs. 2000 à 3000 ventes annuelles y sont organisées, ce qui représente quelques 600.000 objets mis en vente à un prix variant de 1 euro à plusieurs millions d’euros… Les enchères s’y tiennent tous les jours de la semaine, généralement l’après-midi, sauf le dimanche. Les expositions sont organisées un à deux jours avant la vente (en général le samedi, le mardi et le jeudi).
Mais aujourd’hui, le monopole des Commissaires-Priseurs a été largement écorné car les ventes volontaires (c’est-à dire non judiciaires) peuvent être réalisées par des personnes physiques ou des sociétés commerciales déclarées auprès du Conseil des Ventes. De ce fait, à Paris, ils ne sont pas nécessairement tenus d’organiser leurs ventes à Drouot mais dans leurs propres salles de vente ou dans des endroits loués pour l’occasion.
QU’EST-CE QU’UNE ENCHÈRE ?
En France, c’est la technique dite de l’enchère ascendante qui est la plus utilisée. Le commissaire-priseur commence avec un prix de réserve (cf vocabulaire) ; chaque intéressé offre dès lors
successivement un prix plus élevé, tout en respectant une surenchère minimum (qui évolue par tranche de prix). Le processus s’arrête lorsqu’il ne reste plus en lice qu’un candidat. Le bien est attribué au candidat « le plus offrant ». Notez, au passage, que les enchères s’effectuent par lot, chacun portant le numéro d’ordre de passage. Un lot peut être un objet unique (une pièce de monnaie) ou un ensemble (une collection de jetons).
Il n’y a pas de règle en ce qui concerne les prix qui varient entre 1 euro et plusieurs millions d’euros. Avant la vente (généralement deux jours) les objets sont placés en exposition. Les jours d’exposition sont d’ordinaire le samedi, le mardi et le jeudi. Mais parfois, cette exposition peut se tenir également, à titre plus privé, chez l’expert.
De nombreux supports annoncent ces ventes aux enchères à Paris ou dans le reste de la France. Le plus connu est La Gazette de Drouot, qui donne des informations sur les ventes, mais en publie également les résultats, ce qui est très intéressant pour mettre à jour vos catalogues et vous rendre compte des prix réalisés.
COMMENT VENDRE AUX ENCHÈRES ?
Pour vendre un objet ou une oeuvre d’art aux enchères, deux possibilités : tout d’abord s’adresser à l’un des experts numismates qui, chaque année, organisent des ventes aux enchères ; mais on peut aussi prendre contact avec l’une des sociétés de ventes volontaires ou de s’adresser à Drouot-Estimations, qui offre ses services sur toutes sortes d’objets. Dans tous les cas vous obtiendrez une première estimation et l’objet pourra alors être inclus dans l’une des ventes de Drouot.
Attention ! Il peut s’écouler un certain temps entre le dépôt de l’objet et la vente proprement dite. Le vendeur a le droit de fixer un prix de réserve, confidentiel, qui est le prix minimum en dessous duquel l’objet ne sera pas vendu. C’est une véritable sécurité car si les enchères n’atteignent pas ce seuil, l’objet retournera à son propriétaire. Les frais à la charge du vendeur sont fixés d’un commun accord entre celui-ci et le commissaire priseur, en fonction des dépenses occasionnées par la vente.
LES CATALOGUES
Ces ventes font parfois l’objet de catalogues, avec ou sans photographie. Ils sont, d’ailleurs, de plus en plus accessibles sur internet. Chaque lot y est numéroté et décrit. Une estimation moyenne y est mentionnée. Compte tenu des coûts de production et d’envoi, ils sont généralement vendus. Si vous souhaitez ne rater aucune vente dans une spécialité donnée (en l’occurrence la numismatique), vous pouvez vous y abonner auprès de Drouot. Parfois très simples, ces catalogues, sous forme papier, peuvent être très luxueux. Et certains peuvent même devenir, à leur tour, des objets de collection qui vont acquérir une valeur très supérieure à leur prix d’achat. C’est particulièrement le cas des ventes de collections d’amateurs connus : Manuel Canovas, Roger Peyrefitte, Trampitsch…
Il existe également des sites « d’alerte » (Interencheres, gazette-drouot…). Il vous suffit de vous y inscrire en mentionnant un mot-clé (monnaies par exemple) et vous êtes automatiquement informés de toutes les ventes aux enchères dans lesquelles passeront ces types d’objet.
COMMENT ACHETER AUX ENCHÈRES ?
Les objets sont toujours exposés avant la vente. Lors des expositions, l’expert, les commissaires priseurs et leurs collaborateurs peuvent vous renseigner sur les objets et communiquer les
estimations. Les enchères se font pour l’essentiel dans la salle. Un simple signe, souvent discret, suffit à attirer l’oeil du commissaire-priseur ou de ses adjoints. Mais elles peuvent également se faire par téléphone (ce qui est le cas lors de grandes ventes de prestige qui intéressent une clientèle internationale qui n’a pas le temps d’assister à la vente) ou avec un ordre d’achat écrit sur lequel vous avez la possibilité de proposer un prix maximum d’enchère. C’est un pis aller pour ceux qui ne peuvent se déplacer. En revanche, il suffira parfois à quelqu’un de la salle d’ajouter une faible somme supplémentaire pour remporter le lot que vous convoitiez.
C’est pourquoi se développent de plus en plus les ventes « en ligne ». Une caméra est placée dans la salle qui vous permet d’assister en direct à la vente, de visualiser les objets, et de réagir en direct aux enchères. Seule condition : créer un compte qui devra être validé par la maison qui organise la vente.
ATTENTION : tous les lots présentés dans une vente aux enchères sont garantis. La conformité de l’objet à sa description est garantie pendant 5 ans à partir de la date d’adjudication.
QUELS SONT LES FRAIS ? COMMENT RÉGLER VOS ACHATS ?
Dans une vente volontaire, les frais à la charge de l’acheteur sont désormais librement fixés par les sociétés de vente. S’il y a un catalogue, ils figurent toujours sur celui-ci. Dans le cadre d’une vente judiciaire, les frais sont de 14,352 %. Lorsqu’un objet n’atteint pas le prix de réserve fixé par le vendeur, l’objet revient à son propriétaire. Les frais dits « de rachat » correspondent traditionnellement à 3 % du montant de la dernière enchère.
Les vendeurs ont également des frais à payer. Ils sont établis par les sociétés de ventes volontaires et sont variables. Il convient d’y ajouter la TVA. En revanche, les frais légaux, d’un montant de 5 % hors taxe, s’appliquent dans le cadre d’une vente judiciaire.
Quant aux moyens de paiements, ils sont les mêmes qu’ailleurs. Seule limite : les paiements en espèces sont limités à 3000 euros.
Très souvent, surtout dans le secteur qui nous intéresse, vous repartirez directement avec l’objet acquis. Mais ils peuvent également être temporairement conservés par la maison de vente en attente de votre passage, ou envoyés par correspondance.
CONCLUSION
En résumé, la pratique des ventes aux enchères permet de tirer quelques enseignements. Tout d’abord, l’exposition préalable vous permet de voir des objets d’exception, même si vos capacités financières ne vous permettront jamais de les acquérir. Ensuite, compte tenu des prix observés sur la longue durée, il faut acheter ses monnaies dans les ventes de province, beaucoup moins onéreuses, et les vendre dans des ventes parisiennes qui, vraisemblablement, bénéficient d’une plus large publicité et de catalogues de grande qualité. Puis, les prix auxquels les pièces (mais aussi les jetons, médailles ou billets) sont adjugés constituent la seule véritable cotation de ces objets. En effet, ce prix d’achat est bien celui auquel un amateur a, ce jour là, acquis telle ou telle pièce. Enfin, le suivi de ces ventes aux enchères offre chaque année de nombreuses découvertes de monnaies, de millésimes ou d’ateliers jusque là inconnus. Alors, qu’attendez-vous pour vous y rendre ?
VOCABULAIRE DES VENTES
# Adjudication – C’est par le mot « adjugé » prononcé par le commissaire-priseur et ponctué d’un coup de marteau que les enchères s’achèvent et la propriété de l’objet transférée.
# Avance – Possibilité pour un vendeur d’obtenir une avance sur le produit de la vente. Ce n’est pas un droit et cette opportunité, comme le montant de cette avance, se négocie au coup par coup.
# Bordereau – C’est un justificatif remis à l’acheteur par le commissaire-priseur qui fera office de facture. Il est important de le conserver car il porte les caractéristiques de l’objet (description, époque, dimensions), ses références au catalogue, et donc à la vente, le prix d’adjudication et le montant des frais.
# Bulletin – C’est une sorte de certificat temporaire qui vous est remis par le crieur après l’adjudication. Vous en recevrez autant de fois que vous vous porterez acquéreur dans une même vente. A la fin des enchères, l’acheteur se présente au bureau et récupère ses objets en contrepartie de leur paiement.
# Catalogue – C’est la liste numérotée des lots d’objets qui vont figurer dans une vente. Il peut se présenter sous forme de simples feuilles agrafées mais aussi de luxueux ouvrages très illustrés. Notez que, dans ce second cas, ils vont devenir eux-même des objets de collection que les amateurs et les professionnels vont, par la suite, s’arracher. Il en est de même pour la qualité des descriptifs qui peuvent être très sommaires ou très détaillés. Un tableau des estimations y est généralement associé. Notez qu’il est possible, à Drouot, de s’abonner à l’année pour recevoir des catalogues de toutes les ventes dans une spécialité donnée. De même, de plus en plus de commissaires-priseurs offrent la possibilité de les télécharger en ligne.
# Crieur – Comme son nom l’indique, c’est l’assistant du commissaire-priseur qui annonce les enchères et fait le lien avec les acquéreurs.
# Droit de préemption – Droit accordé à l’État, par la loi du 21 décembre 1921, d’acquérir, par l’intermédiaire de ses musées nationaux, un objet en vente publique en se substituant au dernier enchérisseur. Intervenant une fois l’adjudication prononcée, le droit de préemption est exercé sur proposition du Ministère de la Culture, pour le compte des musées nationaux.
# Estimation – Évaluation d’une oeuvre, donnée par une personne habilitée par un expert, dans une société de ventes volontaires, une étude ou par Drouot- Estimations. A ne pas confondre avec une expertise.
# Étude – Office du commissaire-priseur judiciaire, seul habilité à diriger les ventes judiciaires, c’est-à-dire prescrites par la loi ou par une décision de justice.
# Expertise – Le but de l’expertise est d’identifier un bien pour pouvoir ensuite l’évaluer. Pour la plupart des ventes spécialisées, comme celles de monnaies, le commissaire-priseur se fait assister d’un ou plusieurs experts, reconnus dans leur domaine, qui effectuent les recherches nécessaires à la qualification de l’objet et à l’établissement du catalogue.
# Garantie – Les acheteurs bénéficient d’une garantie légale de dix ans quant à l’authenticité de l’objet acquis, tel qu’il est décrit au procès-verbal, dans le catalogue et sur le bordereau. Mais jamais quant au prix de l’adjudication.
# Mise à prix – C’est le point de départ des enchères. Il est fixé par le commissaire-priseur mais se se situe souvent à la moitié de l’estimation.
# Prix de réserve – C’est le prix minimum convenu entre le vendeur et le commissaire-priseur ou l’expert, en dessous duquel l’objet ne sera pas adjugé. C’est une sécurité pour le vendeur.
# Vendre – Pour présenter un objet aux enchères, il suffit de prendre contact avec une société de vente ou une étude, qui procéderont à une estimation de l’objet. En accord avec le vendeur, on fixe ensuite le « prix de réserve ». Le vendeur signe alors une réquisition de vente. Les frais, établis par les sociétés de ventes volontaires, sont variables. Il convient d’y ajouter la TVA. Les frais légaux, d’un montant de 5 % hors taxe, s’appliquent dans le cadre d’une vente judiciaire.
LA PIÈCE LA PLUS CHÈRE
Il semble que parmi les 3 pièces les plus chères du monde se trouvent deux monnaies américaines. La première est une pièce d’argent de 1 dollar frappée en 1794, vendue pour 7,85 millions de dollars. Elle est suivie par une autre monnaie américaine, en or cette fois, de 20 dollars dite « Double Eagle » de 1933, gravée par Augustus Saint-Gaudens et vendue à 7,6 millions de dollars. Vient enfin un double florin d’or britannique d’Edouard III, acquise pour 6,8 millions de dollars.